L’année est anxiogène. Sida, crise des euromissiles, libéralisme reagano-thatchérien destructeur, voilà pour le contexte international, rythmé par la macabre Thriller Zombie Dance de Michael Jackson. L’affiche de l’Euro 1984, en France, est conséquemment lugubre : un gardien de but en ombre chinoise s’envole sur un fond crépusculaire tricolore qui rappelle le drapeau allemand. Un double symbole d’épouvante, de Séville 82 et d’une insolente domination économique subie ? En bas de l’affiche, on croit visualiser des villes en ruines. Reflets d’une France au chômage record qui se désindustrialise ? Seul un rayon de soleil illumine le ballon, que les mains du gardien s’apprêtent à saisir. En début d’année, Apple Computer a lancé son premier Macintosh, dans une tentative marketing d’exorciser l’horreur totalitaire prédite par Orwell (« You’ll see why 1984 won’t be like 1984 ») grâce à l’informatique domestique libératrice. En vain : la novlangue triomphe partout, masquant l’austérité barriste d’avant mai 1981 par la « rigueur » mauroyenne, tout aussi plombante depuis 1983.

Heureusement, à l’aube de cet Euro 84 inauguré le mardi 12 juin par l’attendu France-Danemark au Parc des Princes, les discours des deux sélectionneurs battent en brèche la vision d’un monde et d’un football qui se déshumanisent. « Je n’ai jamais parlé à mes joueurs de résultat, professe Michel Hidalgo. Je leur ai toujours dit de penser au jeu, les résultats viennent alors d’eux-mêmes. » Même approche souriante de la part du sélectionneur allemand du Danemark, Sepp Piontek : « Le footballeur doit être un créateur dans son expression personnelle et, si possible, dans son expression collective, rapportait le 27 mars 2023 le site Thewildbunch22. Nous venons en France pour tenter de retrouver le football comme le jouent les enfants : un jeu vivant et sans contraintes. »

Hollande de substitution

Le petit Danemark aux 5 millions...