La journée était merveilleuse depuis le lever. Les métros, les bus, les tramways semblaient guetter mon arrivée pour démarrer. Les femmes me souriaient. Les vieilles dames me remerciaient. Arrivé au bureau, tout était fluide, les clients étaient enthousiastes, les patrons me tapaient dans le dos, les collègues me jalousaient à la pause déj. Cette journée était aussi parfaite qu’une pub pour une assurance-vie. Le soir venu, installé devant mon match de Champions League, une certitude intime me serrait le cœur. La saison était difficile, c’est vrai. Mais cette fois-ci, devant notre public, j’étais certain que mes encouragements parviendraient aux oreilles des joueurs.
C’est le miracle du football. Les matchs se succèdent mais la liturgie demeure. Parfois il pleut, il fait froid. On est inquiet, on est impatient. Le générique peut varier, éventuellement le jour de la semaine ou l’horaire. On pinaille mais au fond, on s’en fout. Tant que le jeu reste le jeu. On entérine quelques variations à la marge. Un jour c’est le temps additionnel, un autre la couleur des maillots. Le pire qui nous soit arriver ? La VAR, peut-être. Et encore, on n’est pas tous d’accord. Dans l’ensemble, on peut dire, que depuis un siècle, on est plutôt tranquille. Comme la Messe, les déjeuners du dimanche ou les blagues sexistes du tonton, il y a un invariant dans nos vies. Il s’appelle le football. Et au milieu coule une promesse: que jamais rien ne change.
Les pères fondateurs
L’amateur vit dans ce monde mythologique imbibé de rituels bienveillants. La grande histoire — celle qui casse tout — y fait rarement irruption ou alors sous la forme d’un décor de théâtre réaliste. La mise en scène varie, les interprètes aussi, mais l’œuvre est toujours la même. Ici ou il y a un siècle, le temps du football...
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